Rorty | A bomb exploded here or what ?

Ton coeur était serré. Tu sentais ton souffle se faire court, et ce besoin quasi animal raisonnait dans la moindre des cellules de ton être. Il fallait courir. Prendre la fuite. Instinct primaire qui reprenait le dessus, primordial. Sous les bombes, les projectiles en tous genres et autres balles de 22 long rift, tu sautais au dessus d’un obstacle avant de te cacher derrière lui. Bordel, ç’allait être serré. Serré, oui, mais pas impossible. T’avais eu le temps de compter. Bill avait encore quoi… deux, peut-être trois balles. Et ses hommes de mains étaient déjà probablement en panique, rechargeant le plus rapidement possible leurs armes pour te faire disparaître à tout jamais. Mais non. Pas toi. T’étais ici chez toi. Maître des lieux, tu n’allais tout de même pas te faire dématérialiser de la sorte ! Tu comptais tes balles rapidement. six Parfait. Tu profitais d’une accalmie pour te relever soudainement, sortant de ta poche une grenade que tu dégoupillais avec les dents. badass rapidement, tu la lançais en direction de tes assaillants. D’un point de vue extérieur, la scène devait très probablement être au ralenti, c’était obligatoire, qu’elle soit au ralenti. Explosion. Le souffle chaud te fit tourner la tête mais face à toi, ce n’étaient pas tes assaillants, comme tu l’imaginais. Et ton costume de super-héros rouge et noir, tu l’avais troqué pour… Non. Non. Impossible. Pas ces vêtements. Cette chemise hawaïenne de merde, et ton foutu short beige. La scène était floue. Tes yeux ne comprenaient pas, mais ton cerveau, lui, savait. Le coeur se serrait de plus en plus, ton souffle se coupait. Autour de toi, les débris du bateau dans lequel ta femme avait péri. Ces fringues que tu portais avaient subi le même sort que ta dulcinée : t’étais plus capable de les porter après l’ « incident » et puis. Une odeur permanente de fumée, c’était pas pour toi.

Bruyamment, tu toussais, reprenant une grande respiration qui te fit sortir de ton cauchemar, assis dans ton lit, le nez dans tes genoux. T’étais ruisselant, et ton coeur battait si fort que t’aurais pensé qu’il quitterait ta poitrine à tout instant. Putain. Depuis le départ de Rory, tes nuits se ressemblaient. Tu faisais comme si de rien n’était, mais au fond, tu ne gérais absolument rien : comme si, maintenant que tu étais seul, tes démons avaient décidé de se réveiller. Dans le fond… t’étais pas vraiment seul : ils t’accompagnaient à longueur de temps. Trempé de sueur, ce n’était ni la chaleur ambiante ni une fièvre, qui t’avait mis dans cet état. Ta nuit était ruinée, et tu te levais rapidement histoire de changer tes draps et de prendre une douche froide afin de te changer les idées. Mais une fois sorti de là… tu n’étais plus vraiment certain de vouloir retourner te coucher : et si tes démons revenaient te hanter ? Non. Sans toi. T’avais clairement pas la force et surtout, besoin de voir ta femme. En un seul morceau. Et ton fils. Bon, pour l’un, ça aurait pu être beaucoup plus simple, mais tu n’étais pas certain que ton fils n’apprécie la vanne, de se faire réveiller par son con de père en larmes au milieu de la nuit. Il te fallait une solution plus… immédiate. Et que tu pourrais mettre en place seul la masturbation ? Nooon mieux. Tu allumais ton ordinateur, et te replongeais dans ta partie top secrète d’un plaisir coupable : les sims. C’était peut-être débile, mais c’était la seule façon que tu avais trouvée pour garder ta famille auprès de toi. Comme avant. Une sorte de… journal intime amélioré, sans les aveux de pucelle de quatorze ans.

Lorsque tu as entendu du bruit dans la cuisine, tu as d’abord cru à … rien. Ca, ç’aurait été le job d’une personne normale. Toi, casque sur les oreilles, t’étais bien trop occupé à chanter ce machin en français, dont tu ne comprenais que la partie en anglais : clairement, ça n’était pas du Shakespeare. Mais ça faisait le taf, de te garder loin de tes pensées morbides. Non mais sérieusement : « I’ve got a fever, can you check ? Hand on my forhead, kiss my neck » non mais… qui avait écrit ça ??? le coup de la fièvre, tu l’avais fait un nombre incalculable de fois à la mère de ton fils. Eh merde. Voilà que tu te remettais à cogiter. Mais de façon différente, cette fois. Car ce n’était plus son décès, qui se répétait dans ta mémoire, mais ces moments privilégiés que tu pouvais avoir avec elle. Toutes ces pulsions de vie partagées… qui faisaient qu’aujourd’hui, t’avais pas encore décidé de te flinguer. Parce que ces pulsions de vie elles t’avaient, mine de rien offert… « le plus beau des ca... » une voix grave te sortit de tes pensées marmonnées. Dans ton corps tout entier, comme une décharge électrique, et tu finissais ta phrase, ne comprenant pas encore ce qui se passait « DEAUUUUU…. OOOOOH PUTAIN RORY TOURNE LA TETE JE REGARDE UN PORNO !!!! » Oui, ok, ç’avait l’air con, vu comme ça. Mais c’était tout ce que tu avais trouvé, sur l’instant, avant d’éteindre ton écran en panique. Avouer que tu jouais aux sims avec assiduité ? Plutôt crever. Ca aurait presque pu marcher. Si la musique du jeu n’avait pas continuer de s’ébruiter dans la pièce, en investissant l’intégralité de l’espace. Eh merde. À le sentir tâter ton cou dans tous les sens, tu attrapais sa main que tu repoussais, te relevant de ton fauteuil, flottant dans le plus vieux de tes boxers. Ouais. Clairement… ce n’était pas le plus beau des tableaux, que tu lui offrais à voir. Rapidement, tu tentais de cacher ta crasse d’un coup de pied, lui adressant un sourire forcé « oh, come on ! L’autonomie aurait-elle fait de toi une chochotte ? » tu te mis à rire avant de le prendre dans tes bras. Putain. Ce que ça faisait du bien, de sentir ton fils de retour. Enfin. « il s’est rien passé. J’ai juste… Tu sais comme je suis. J’me suis un peu … laissé dépasser par les évènements ? J’suis sur un gros truc. J’travaille beaucoup. Et j’ai pas fait gaffe. Et puis… merde, depuis quand c’est au fils de faire la morale a son père ?! » tu te mis à rire et cherchais à tatons dans le bazar de ton bureau ton paquet de cigarettes. T’en sortais une que t’allumais, et sortais quelques instants pour enfiler un jogging : « quel bon vent t’amène ? Me dis pas que t’es juste venu juger mon ménage, j’te croirais pas. » tu riais légèrement, avant d’aller vous attraper deux bières et de t’installer de nouveau sur ton fauteuil de gaming, tirant un tabouret pour ton fils.

Eh merde. Alors là, tu venais de t’être fait avoir, comme un bleu. Le genre de prise la main dans le sac, humiliante et nécessaire. De celles qui faisaient de la vie ce qu’elle était, avec ses coups de blues, et surtout, ses coups de honte. Dans ta tête, tu te remémorais tes plus grands moments de gêne, malgré toi. Comme si faire un point sur ta vie était vraiment le moment ; alors que tu venais clairement de balancer à ton fils que tu étais en pleine séance de secouée de prunier.

D’abord, il y avait eu cette fois, à onze ans. Ton père t’avait choppé à rouler des pelles à ton poster de Farah Fawcett. T’étais tombé raide dingue de cette blonde gracieuse, dès le premier épisode des drôles de dames, et ton amour adolescent mêlé à tes hormones avaient fait un sacré bordel. T’avais été mort de honte. Mais si tu avais su à l’époque que tu pourrais avoir encore plus honte que ça… t’aurais gardé ton énergie. Car cet épisode n’était rien, face au très célèbre « Je me fais griller en me secouant véritablement le cocotier ». Par ta mère. La pire des choses. Pire encore que la fois où tu avais surpris tes parents en train de … Non . P’t-être pas pire, fallait pas déconner. Ton Oedipe en avait pris un sacré coup ce jour là. Dix ans de psychanalyse, après ça. Pourtant, c’était un choc ordinaire, de ceux que tout le monde affrontait, y’avait pas de quoi en faire un fromage. Enfin, y’avait aussi eu ta demande en mariage. Comme le voulait la tradition, tu t’étais agenouillé. Mais ton pantalon, plus tendu que toi avait lâché avant tes nerfs, laissant apparaître ton calbut aux yeux du monde. Niveau romantisme… on pourrait repasser, non ? Tu t’étais senti con, tellement con, que t’avais passé la soirée au garde à vous, attendant impatiemment que ta future femme ne décide de rentrer. Enfin, la libération. La voix de Rory te sortait de tes pensées, chassant tes moments de solitude de ton esprit :

« la tête que j’t’ai… HA. Comme si j’nous avais recréé là dedans… non, tu sais bien que non. J’retravaille les bugs du jeu, rien de plus. C’est une commande d’Origins ! » Une commande d’Origins ? Sérieusement ? Alors là… tu t’étais surpassé : tu ne travaillais même pas pour eux ! T’appliquais donc la très célèbre philosophie du « plus c’est gros plus ça passe » ? visiblement, oui. Mais il y avait de fortes chances pour que ton fils ne soit pas dupe : il te connaissait assez bien pour ne pas se laisser avoir. holy shit rapidement, tu partais te changer, et revenais avec de quoi boire pour vous deux. Tu levais les yeux au ciel, avant de rire, t’allumant une cigarette « sauf preuve du contraire...c’est pas moi qui suis en train de me trouver des excuses pour venir voir mon père, mon p’tit chat. Mais… effectivement, t’es toujours le bienvenu, chez toi. » tu riais légèrement, tirais sur ta cigarette et l’écoutais attentivement. Tu voyais bien le coup venir. Tu le sentais, aussi. En même temps, tu ne pouvais pas faire autrement, t’avais peut-être pas tant d’écart d’âge avec ton fils, tu sentais ces choses là. Instinct de papa. Affectueusement, tu tapotais sa cuisse, lui adressant un clin d’oeil « j’ai pas fait de courses ; j’t’attendais pas. Mais on peut commander ? J’imagine que tu restes quelques jours ? » sourire aux lèvres, tu commençais à ramasser tes affaires, rangeant rapidement : il fallait bien croire que ton mode ado devait se désactiver là, tout de suite. T’étais peut-être bordélique, mais tu ne voulais pas accueillir ton fils dans la crasse.

Mon père en train de regarder du porno ? J’avoue que ce pourrait être gênant pour lui si ça avait vraiment été le cas. Par contre, de le trouver en train de jouer au sims ça aussi c’est un peu gênant, maintenant reste à savoir ce qui est le plus gênant pour lui entre les deux. Lui en train de se branler le manche ou lui en train de faire notre petite famille sur les sims et y jouer durant des heures, parce que vu son allure actuelle… Il n’est pas sur le pc depuis seulement quelques minutes. Il y a un petit moment de silence entre nous, moment de silence accompagné par la musique des sims, qui nous donne presque l’effet d’être directement dans la partie et que son personnage aurait un bug. J’hausse un sourcil en prenant une taffe et je le regarde calmement sans rien dire, soufflant la fumée entre mes lèvres. C’est presque comme de la petite musique d’attente quand tu appelles quelque part. Votre appel est important pour nous, garder la ligne pour conserver votre priorité d’appel. Un agent se fera un plaisir de vous répondre dans les plus brefs délais… toutitoutitoudoutoutitoudoutitdu… Ce moment d’attente est contre notre volonté, merci pour votre patience, un agent sera avec vous sous peu !

Le voilà qui semble s’éveiller. Je secoue la tête en levant les yeux au ciel. “C’est clair que tu nous a recréer, tu me trouves si parfait que tu as voulu une réplique de moi dans ton jeu ! Arrête de mentir c’est pas bien, ton nez va allonger Pinnocchio ! ” Je ris en le regardant, curieux de voir quelle excuse il va me donner encore. Pendant qu’il sort pour aller se changer j’en profite pour ouvrir l’écran et voir sa petite famille. Je rigole en voyant la tête qu’il s’est donné, curieusement, on dirait qu’il s’est donné beaucoup plus de mal pour refaire maman que nous deux. Je fronce les sourcils. “J’ai pas cette tête de noeud non mais tu aurais pu te forcer un peu !” Je parle assez fort pour qu’il puisse bien m’entendre et je referme l’écran pour retourner à mon tabouret. Je prends la bière qu’il me tend et j’en avale une gorgée, je passe proche de m’étouffer avec celle-ci. J’allais lancer une réplique bien cinglante pour lui faire comprendre que j’avais bien d’autre chose à faire que ça, mais en vrai, il avait visé juste. “Touché !” Je pince les lèvres dans un petit sourire. Il aurait pu me dire que j’étais assez grand pour m’arranger tout seul, que j’aurais dû aller à l’école plus longtemps plutôt que d’essayer de percer dans la musique et que, disquaire, ce n’était pas un vrai job. En vrai, je ne me souviens pas d’une fois où mon père a essayer de me décourager dans ce que j’avais envie de faire et Dieu sait que j’ai dû lui casser les oreilles souvent en jouant, surtout quand j’étais encore novice et que j’arrivais pas à aligner deux notes de manière correctes. “J’ai essayé de t’écrire un peu plus tôt, mais tu ne répondais pas. ” Je prends une dernière taffe de ma clope avant de l’écraser dans le cendrier. “Ça me va si tu veux…. Puis en même temps… Je pense que tu as besoin de sortir un peu de ton terrier non ? ” Je me lève et je le serre contre moi à nouveau. “Merci P’pa !” Je sors de son bureau, pour aller ramasser mes affaires. “J’vais juste aller porter ça dans ma chambre et après je vais te donner un coup de main ! ” Je passe l’étui de ma guitare sur mon épaule et mon sac dans les mains pour aller vers ma chambre.

C’était étrange, comme sensation. En fait, t’étais à la fois heureux de voir ton fils… et aussi en colère. En colère que ce grand couillon n’ait pas eu la présence d’esprit de te prévenir de son arrivée. Bon, ok, dans le fond, ça ne changeait probablement rien ; c’était pas comme si tu préparais des trucs de malade quand il était là. Simplement, t’aurais au moins évité d’avoir ce putain de jeu qui tournait en fond, lorsqu’il arriverait. T’aurais probablement joué sur Word Of Warcraft, jeu auquel t’étais beaucoup trop accro… dépendance à laquelle ta partenaire de jeu était loin d’être étrangère. Mais là encore, t’étais pas certain que ton fils accepte le fait que tu puisse jouer une elfe plus bombasse que dans ses rêves les plus fous: fallait être réaliste deux secondes : il se foutrait probablement de ta gueule. Même si dans le fond, toi, tu t’en foutais : tu savais qu’avec ton niveau, tu ne mettrais pas longtemps à lui faire mordre la poussière s’il venait à te défier. Tiens, quand on y pensait, c’était peut-être un argument de taille : c’était peut-être bien lui, le plus adulte de vous deux. Mais plutôt crever que de lui donner ce plaisir : tu ne lui donnerais pas raison là dessus, jamais ! T’avais quand même changé ses couches, alors un peu de respect envers les anciens ! Quoique. T’étais pas un croulant non plus, mais là, t’étais clairement en train de divaguer.

Tu te concentrais de nouveau sur lui, ne sachant pas combien de secondes, de minutes, voire, dans le pire des cas, de dizaines de minutes avaient pu se passer. Tu mordais ta lèvre inférieure, un peu gêné et secouais la tête : « arrête, Rory, t’es lourd ! » tu n’essayais même plus de lui donner des excuses : à quoi bon ? T’étais grillé, et tu l’avais mauvaise. L’air de rien, t’étais allé te changer, et tu avais soupiré en l’entendant : visiblement, il avait fini par faire connaissance avec son alter ego. Tu te rasseyais à ta place et levais les yeux au ciel, un vague sourire se dessinant sur ton visage. Tu lui tendais sa bière et lançais : « t’as pas pu t’empêcher, hein ? » là, t’avais pris une gorgée de ta bouteille, avant de reprendre, moqueur « c’est bon ? T’as vu la tête que j’t’avais faite ?? bon . Désolé hein, elle est pas géniale mais… quand on voit l’original, on comprend que je ne peux pas faire de miracles. »tu réprimais un rire et lui tirais la langue, moqueur. Dans le fond, avoir un Rory parfait en jeu, tu t’en foutais : l’original était bien mieux que sa copie, même si tu venais de lui assurer le contraire.

Dans le fond, ça te faisait quand même bizarre, de retrouver ton fils chez toi. Pas que t’aurais préféré l’inverse, au contraire, tu adorais sa compagnie. Mais… tu n’étais plus habitué à sa compagnie dans ta vie de tous les jours : t’avais quand même été vachement bien habitué, sauvé de la solitude par ta famille de tes seize à trente et un ans. Alors depuis cinq ans, t’apprenais à gérer Le manque. Parfois, c’était difficile, mais tu tentais tant bien que mal de soutenir ton fils dans ses projets, aussi bancals pouvaient-ils être. T’étais pas là pour le juger, mais pour le pousser, l’aider dans ce qu’il entreprendrait, pour qu’il se vautre de la façon la plus douce, ou réussisse de la meilleure des façons. Fin de l’histoire Ca te faisait bizarre, donc, qu’il soit de retour, d’autant que tu t’étais pas mal étalé jusque dans sa chambre. Tu avais couru pour lui barrer la route, hors de question qu’il n’entre dans ce champs de ruine, encore moins qu’il ne découvre les trous de boulettes dans ses draps… et qu’il comprenne. T’as soufflé, bloquant la porte, et t’as lancé « t’as peut-être pas tort, pour ma tanière. J’veux bien en sortir. Mais … tu veux pas attendre pour entrer dans ta chambre … ? je … y’a des trucs qu’il faut que je te montre au salon et… » et quoi ? Aucune idée, t’étais en panique. « j’t’en supplie ne rentre pas ! » avais-tu fini par lâcher un peu sans pouvoir tenir ta langue. Eh merde. C’était sûr, il allait vouloir entrer, maintenant.

Mon père et moi on a toujours eu une relation peu commune, le peu de différence qu’on a en est fort probablement la cause première. D’ailleurs, je me suis souvent fait demander pourquoi j’avais mon grand frère qui m’accompagnait lors des journées pour les parents. Je me souviens même de regards que certaines profs avaient jeté à mon père, le trouvant plutôt mignon. Le pire, c'est que lui ne voyait rien et ne se rendait pas compte de l’effet qu’il pouvait faire. Ça me faisait toujours beaucoup rire, surtout quand je lui disais après. J’ai encore du mal à vivre loin de lui, simplement parce que ça n’a jamais été compliqué d'être son fils. J’avais un père qui était aussi mon ami et j’ai toujours pu parler de tout et de rien avec lui. Il y avait très peu de tabou entre nous. Par contre, côté maturité, j’ai toujours su que j’étais le plus mature des deux, et je ne suis pas le mec le plus responsable sur terre, donc ça fait peur quand on pense au niveau de mon père. Mais bon, c’est comme ça que je l’aime !

Je crois qu’il a eu un bug 404 error Parce qu’il semble complètement perdu quand je lui demande la tête qu’il m’a fait dans le jeu des sims. La petite musique continue de tourner en musique de fond et c’est assez perturbant pour être honnête. Surtout si on voit qu’il lague. « Je peux l’être encore plus si tu veux ! » Je hausse les épaules et je profite de son absence pour aller jeter un œil sur l’écran.  Je me permet de critiquer, parce que franchement mon personnage virtuel ne me ressemble pas tellement. « On voir clairement sur quel sims tu as mis plus d’effort ! Franchement pour quelqu’un qui fait des jeux, on se serait attendu à plus de talent ! » Il ne se gêne pas pour me vanner alors, je me permets de faire la même avec lui !

Mais bon, ce n’est pas tout. Je pourrais peut-être m’installer pour les prochains jours et lui donner un coup de main avec ce foutoir. Parce que bien que je ne sois pas le mec le plus ordonné, ce que je vois dépasse l’entendement ! Je sors de son bureau et je vais récupérer mes affaires que j’ai abandonnées dans l’entrée pour aller à ma chambre et rapidement mon père me bloque le chemin. Je lève le sourcil, suspicieux. Il y a anguille sous roche, depuis quand mon père veut pas que j’aille dans ma chambre. Surtout que ses excuses sont vaseuses. « Qu'est-ce que… » La supplication est de trop, je le pousse pour aller ouvrir la porte. Il y a des choses partout et… une drôle d’odeur ! Je pose ma guitare contre un mur et mon sac juste à côté. Je m’avance vers mon lit et je retire les draps et me retourne vers mon géniteur. « T’es venu fumer dans ma … » Mes livres dans la bibliothèque ne sont plus à la même place…. je laisse tomber les draps et je vais fouiller dans ma cachette. J’ouvre le petit coffret en métal ou je garde en général mon stock. J’en garde toujours une partie ici pour les moments plus difficiles. « Je pense que je vais avoir besoin d’une explication jeune homme ? Je pense que tu as besoin de plus de supervision! » J’ai l’impression d’être face à moi adolescent!

Quel con, mais quel con !! d’abord, il y avait eu l’incident Sims. Celui là, tu l’avais tout de même vachement mal vécu. Ah non mais c’est vrai quoi ! Le délire « je me fais gauler par mon fils et réagis comme une pucelle en panique… » très peu pour toi. Nom de dieu, non mais c’était quoi ce délire ? Pourquoi avait-il fallu que tu perdes tes moyens de la sorte ?? Tentant de reprendre contenance, tu t’étais assis dans ton siège, et sur l’instant, il fallait bien admettre que t’avais carrément envie de ne faire qu’un avec le cuir de ton fauteuil gaming pro, tellement confortable qu’il ne lui aurait manqué que le siège chauffant pour que tu ne décides de passer ta vie dessus. Mais pour une fois, ce n’était pas une question de confort. En fait, t’aurais aimé disparaître. De façon générale, tu n’avais que très rarement honte de tes agissements. Eh, quoi, t’étais assez grand, pas de quoi faire un drame de choses qui … Ben, n’en étaient pas, tout simplement. Cependant, que ton fils puisse voir tes créations, dont… ta défunte femme aka sa… défunte mère, ça te foutait mal à l’aise. Parce que dans le fond, ce jeu témoignait de ce que tout le monde avait déjà compris sauf toi : ton deuil, il était loin d’être fait, même près de dix ans après tout ça. Tant pis. C’était trop tard. Maintenant, Rory savait. Rory connaissait ta faiblesse dont il se doutait déjà très probablement. Tu soupirais, avant de lui flanquer un coup vengeur dans le bras « hey. J’ai pas développé ce jeu, moi. J’fais ce que je veux avec ce que j’ai ! Et puis… il faut dire que le modèle n’est clairement pas mannequin. Ca part mal, hm ? » tu riais, moqueur, avant de prendre une nouvelle gorgée de ta bière. Le pire était passé, du moins ça, c’était ce que tu pensais. Car maintenant, le voila qui voulait aller dans sa chambre ! Ah ça, c’était un peu fort ! Tu lui barrais d’abord la route. Histoire de… de… de gagner du temps. Mais tu savais pertinemment que ça ne marcherait qu’un temps. Tu paniquais. Bordel de merde… Tu pris une grande inspiration et le laissais te pousser de guerre lasse. Levant les yeux au ciel à sa réaction tu soupirais. Au fond de toi, il fallait bien dire que tu te sentais… peut être admiratif. Oui, c’était ça. Admiratif. Bon, il t’engueulait, et ton rôle de paternel était en train d’en prendre sévèrement un coup, mais tout de même. Tu l’observais, avant de réaliser que malgré votre écart d’âge peu marqué, il n’avait pas à prendre la confiance de la sorte. Sourire en coin, tu croisais les bras sur ton torse, avant de lancer : « wow.. wow… wow. C’est moi ton père ou t’es le mien ? J’vais changer tes draps, ok. Je… Ouais. J’ai merdé. J’ai fumé ta réserve, c’est vrai ! Mais regardes... » tu sortais un pochon de ta poche et le lui lançais : « j’ai été racheter exactement la même quantité. On est quittes. » que ton fils fume de la weed ? Tu avais toujours été à l’aise avec cette idée. D’abord, parce que, que tu lui interdise ou non, il finirait bien par le faire, si l’envie était vraiment là. Ensuite, parce que… toi aussi t’avais été jeune : tu l’étais toujours. Mais pour autant, tu n’étais pas devenu un junky à la con : une fois de temps en temps, un joint ne faisait aucun mal.

A la hâte, tu tirais les draps d’un geste franc et les roulais en boule dans tes bras, prêt à les foutre en l’air « ok. J’ai un peu laissé les choses s’entasser. Mais… laisse moi quelques minutes pour tout remettre d’aplomb, tu veux ? Prends une douche, installe toi. J’m’occupe du reste. » oui, tu n’étais pas au mieux de ta forme. Mais ton fils restait ton fils. Et tu te plierais toujours en quatre pour lui.

Notre relation père fils n’a rien de traditionnel, beaucoup ont dû juger mon père pour la façon qu’il avait de m’éduquer. Je me souviens aussi du regard de surprises que certains enseignants avaient quand ils comprenaient que ce n’était pas mon grand frère, mais bien mon père ! Je connais des frères et sœurs qui ont plus de différences que nous deux ! Je ne changerais pas de père pour rien au monde, malgré nos chicanes passagères, on s'entends plutôt bien et maintenant que je suis adulte je peux dire que c’est mon meilleur pote. On est pareil, un peu trop parfois. Sauf que lui c’est dans les jeux vidéos qu’il va trouver un réconfort, les sims … tss un jeu que les fillettes de douze ans affectionne particulièrement, tandis que moi c’est avec ma guitare, on s’évade comme on peut non ? Je décide d’arrêter de me plaindre, parce que là mon père commence à manquer de réplique et il accuse les concepteurs du jeu de ne pas avoir assez de choix pour me faire une tête convenable dans le jeu alors que la mère qu’il a créé dans le jeu est magnifique ! Je bois ma bière et soupire avant de décider d’aller à ma chambre. Nouvelle couille, mon père tente de me bloquer le chemin pour aller dans ma chambre. Mais, rapidement je passe pour voir le bordel qu’il y a dans ma chambre. Le fait qu’il a fumer mon stock que je garde caché ici ! Je l'engueule, bah façon de parler je le chicane pas fort non plus, mais je pense que c’était peut-être la goutte de trop. Parce qu’il me stop dans ma diatribe et reprends son rôle de père. J’ai même vu le masque de forme sur son visage… « Mais … mais… » J’attrape le pochon qu’il me lance soupesant la quantité ! « Parfois je me demande qui est le père quand même ! »

D’un coup j’ai l’impression de redevenir gamin en le voyant tirer sur mes draps. M’offrant de me reposer pendant qu’il range et même d’aller prendre une douche. Je le regarde en me pinçant les lèvres, il n’a pas l’air au top de sa forme… « P’pa… » Je m’arrête dans ma phrase, baissant la tête légèrement. « Tu… Est-ce que… tu crois que je suis un raté ? » La question peut paraître sans fondement, mais je me pose de plus en plus la question. J’ai trente ans et toujours rien devant moi !