Undercover Delivery ~ Larty1

Je comprenais un peu mieux mon fils et sa légère addiction aux jeux vidéos depuis que moi-même je m'étais retrouvé accro à ce truc. Chaque soir le même rituel, je laissais Charlie faire sa dernière partie puis éteindre sa console dans le salon pour qu'en suite il se brosse les dents et partent se coucher aux alentour maximum de 22h. Une demi-heure de plus que l'heure fixé depuis maintenant de nombreuses années obtenue suite à de forte négociation de la part de la chair de ma chair. Une fois mon monstre de fils au lit, je me glisse alors en toute discrétion devant la télé et réallume ni vu ni connu la console pour me connecter sur le compte que ma créer ma progéniture. Et c'est là que je passe le plus clair de ma nuit, jusqu'à être suffisamment fatigué pour m'endormir sans remarquer que comme depuis 5 ans maintenant, je m'endors seule sans Kyle à mes côtés.

Et puis il y avais eu cet homme, qui commença a partagé mes nuits de manière tout à fait virtuel dans de longue partie de World of Warcraft ! Il était devenu mon partenaire de quête favoris. Ce que je connaissais de lui ? Son pseudo, sa voix et son avatar féminin pourvu d'un sacré parechoc... et c'est tout. Je ne connaissais ni son nom, ni son visage et si au début cela ne m'avais pas forcément dérangé, à présent le manque de ces informations avait commencé à me tirailler car malgré tout je m'étais attaché à cet abruti. J'avais essayé à plusieurs reprises de lui proposer de se voir IRL comme disent les jeunes mais... cela s'était toujours révélé être un échec.

J'avais fini par abandonner jusqu'à que la curiosité soit si forte que cela devenait compliqué de ne pas utiliser les moyens mis à ma disposition pour provoquer un peu le destin. Et puis qui verrait que j'ai consulté l'adresse I.P lié à son compte afin de faire remonter son nom et son adresse et peut être un peu son numéro de téléphone également... Ce n'étaient quelques cliques, pas vraiment méchant et ce n'était pas une utilisation malveillante après tout non ? Un petit tour sur les réseaux sociaux et bam, j'avais un visage sur ce pseudo et ce nom par extension. Marty Fisher, 46 ans, développeur de jeux vidéos et... franchement ? Super sexy. Je m'attendais pas vraiment à un physique si avantageux. Voilà plusieurs jours que je scrutais ses réseaux sociaux, que je les passaient au peigne fin cherchant ce qui clochait pour qu'il ne veuille pas me rencontrer et surtout... pourquoi était-il encore célibataire ?? Cas social ou psychopathe ? En tout cas, rien à signaler à première vue.

Vendredi soir, Charlie dormait chez un copain et je continuait de scroller ce profil que je connaissais par coeur maintenant. Bon sang... Qu'est ce que tu cache Marty, il y a forcément quelque chose... Est-ce que tu serai... Gay ?! Je me frappais le front tellement cela devenait évident. Il jouait un personnage féminin, tout était plus clair mais je voulais une confirmation... une vraie confirmation. Alors j'avais mis son téléphone sur écoute. Comment ça je suis extrême et obsessionnelle ? 19h. Il passe un appel à la pizzeria proche de chez lui. Mon sang ne fait qu'un tour, j'attrape un calepin et note la commande avant de sauter dans ma voiture et de foncer à tout allure pour récupérer exactement la même commande. Je simule une envie de pisser pendant que la commande se prépare et me glisse discrètement derrière un employé pour accéder à l'arrière de la pizzeria et voler un uniforme de livreuse. Je récupère ensuite la commande et file pour arriver avant le livreur. Je me change dans la voiture et en deux en trois mouvement me voilà devant sa porte, le coeur palpitant. Bordel Lucy t'es vraiment tarrée... J'appuie finalement sur la sonnette tentant de faire mon sourire le plus commercial possible, mais je n'en mène vraiment pas large.

@Marty Fisher

Tes journées ces derniers temps ? Rien de plus simple. Elles se résumaient à jouer, programmer, comater devant ta série préférée, ou parfois faire des courses. Rien de très palpitant. En fait, tu crevais d’envie. Oh, bien sûr, tu aurais pu aller voir Rory au magasin de disques, mais tu ne voulais pas avouer que la solitude te pesait. Surtout pas devant lui. Affirmer que tu avais besoin de lui ? Plutôt mourir. Fierté mal placée ou envie de le protéger de tes vieux démons ? En fait, c’était très probablement un mélange de tout ça. Et puis, il y avait aussi le fait que tu ne tenais pas particulièrement à sortir, ces derniers jours : chacun avait ses périodes, et toi, t’étais bien plus déterminé à rester chez toi qu’à vivre une vie de débauche. Oh, bien sûr, lorsque ton grand petit était à la maison, tu n’avais pas d’autre choix que de t’adapter. Sortir un peu, l’accompagner dans ses conneries, souvent. Et surtout : enfin te sentir complet. Mais Rory n’était pas là ,et tu ne pouvais compter sur personne d’autre que toi, pour aller mieux. Et en attendant de trouver mieux, tu avais allumé ta console ; encore. C’était d’ailleurs ainsi que tu l’avais rencontrée, cette fille qui , d’abord au hasard puis de façon systématique, était devenue ta sœur d’armes lors de tes raids sur Word Of Warcraft. Difficile pour toi de l’imaginer réellement. Il fallait dire que son personnage, purement testostéroné, un chevalier de la mort Draeneï, contrastait plein gaz avec ton elfe mage aux formes plantureuses défiant toute concurrence. Même toi, tu les trouvais un peu abusées : où diable avais-tu la tête, lorsque tu avais choisi le skin de ton perso ? Ou plutôt… non. La tête, on sait exactement où tu l’avais rivée, à cet instant précis.

Le courant passait tellement bien entre vous, que vos parties du soir étaient devenues un véritable rituel, que tu n’aurais raté pour rien au monde. En réalité, même toi, tu ne comprenais pas vraiment pourquoi tu refusais ses demandes répétitives et insistantes d’une rencontre. Après tout, cela ne vous engageait à rien ? Mais… c’était trop tôt. Beaucoup trop tôt. Oui, même bientôt quinze ans plus tard, tu avais l’impression qu’Ally était partie six mois auparavant, tout au plus. Tu ne pouvais pas lui faire ça. Ca te fendait le coeur, mais ta nouvelle amie s’en remettrait. Et puis, ce qui se passait sur le jeu restait sur le jeu, n’est ce pas ? Le coeur serré à chacun des messages demandant une nouvelle rencontre, tu déclinais les invitations, trouvant toujours une excuse meilleure que la précédente : avec un peu de chance, elle finirait bien par se lasser. En attendant… vos petites parties de plaisir chaste continueraient, inlassablement. Vos vocaux aussi, pour ton plus grand plaisir : sa voix te donnait le sourire. Comme si elle avait eu le pouvoir de colorer ton quotidien pourtant si terne.

dix-neuf heures loin d’être encore l’heure de votre rendez-vous quotidien, tu commençais à avoir sévèrement les crocs et ne résistais pas longtemps à l’envie de commander une pizza. Tant pis pour les repas équilibrés. T’en avais marre des diktats débiles que tu pouvais entendre partout. Oui ; plus qu’un snack, cette pizza deviendrait un acte politique, si cela pouvait te donner une quelconque excuse pour pouvoir bouffer du gras en paix.

dix-neuf heures trente ça sonnait à ta porte. Enfin. Dans ton estomac, la section des tambours et grosses caisses allaient bon train : t’avais la dalle, et tes gargouillements auraient pu réveiller les voisins les plus lointains, à des kilomètres à la ronde. D’un pas pressé, tu ouvrais la porte à ton livreur préféré, « Beeeen ! Mon p’tit chat ! T’en as mis du temps ! J’ai cru que j’allais devoir te... » merde. Phrase en suspend : c’était pas Ben. T’es resté Idiot, face à cette blondinette que tu n’avais jamais vue. Et pourtant, tu commençais à tous les connaître, les livreurs de chez Tony. Tu terminais ta phrase un peu surpris « bouffer. » refermant presque aussitôt ta bouche bée, grande ouverte. Tu te reprenais, et lançais « euh… salut. Vous êtes nouvelle, non ? J’veux dire.. je ne vous ai jamais vue… enfin… il est pas là, Ben ? » tu finis par te dire que ton obsession pour Ben pourrait être mal interprêtée, et tu te rattrapais : « excusez moi. Vous allez vous demander ce que j’ai après votre collègue. C’est un jeu entre nous. Bref… euh… bienvenue ? » tu lui adressais un sourire, avant de lui tendre un billet pour régler ta commande : « on risque de se revoir souvent. Mon fils et moi commandons souvent chez vous. » tu lui adressais un sourire, toujours aussi perturbé par ce minois auquel tu aurais pu donner le bon dieu sans les confessions prérequises. Bordel… est-ce que t’étais mort devant ta console ? Clairement, tu te posais la question : elle avait l’air d’un ange tout droit tombé du ciel.

Un peu déçu de ne pas être face à ton meilleur pote livreur ? Pour être honnête, oui, tu l’étais. Mais dans le fond, tu t’en foutais pas mal : ça n’allait pas t’empêcher de dormir, et encore moins de profiter de ta meilleure pizza. T’avais la dalle, t’étais capable de ne penser à rien d’autre, fin de l’histoire. Même si… quelque chose te chiffonnait : tu connaissais cette voix, mais incapable de savoir d’où. T’allais d’ailleurs lui demander si vous vous étiez déjà rencontrés quelque part, de crainte que ton sens de la physionomie – plutôt pas dégueu en temps normal ne te fasse faux bond lorsque... Mental Breakdown Attends, attends, t’es en train de rêver éveillé, Marty, ou est-ce qu’elle vient de te proposer de la croquer toute crue ? Bon, ok, elle était loin d’être repoussante – en fait, elle était même carrément ton genre ; mais… est-ce que tu avais bien entendu ? Non. Bien sûr que non. Réfléchis, deux secondes, Fisher. Pourquoi une livreuse canon viendrait sonner chez toi pour te faire des avances ? Ça n’avait pas de sens : on n’était pas dans un porno douteux, mais bien dans la vraie vie. Tu savais pas quoi répondre, alors t’as lancé « euhm… En fait… le cannibalisme, c’est pas vraiment mon truc et… euhm… » t’as hésité, relever son lapsus ou non ? Tu mordillais ta lèvre inférieure, et lâchais « généralement… C’est plutôt moi, qui sors ce genre de conneries. Ils recrutent à l’humour, chez Pizza Tony ? Je devrais peut-être tenter ma chance ! » là, tu riais légèrement et t’apprêtais à la payer, lorsqu’elle t’informa de la gratuité des pizzas « mais… ça fait plus de cinq minutes, que vous êtes là, vous étiez dans les temps ! » tu insistais, souriant légèrement au comportement de la demoiselle. Il était loin d’être habituel, mais tout aussi loin d’être dérangeant : il y avait là quelque chose de frais, dans ses façons de faire. Quelque chose de… bref, quelque chose qui t’apportait un peu de baume au coeur dans ce quotidien grisâtre. Tu lui adressais un sourire, attrapant les Pizzas et la remerciais « Bon. Ok. Je crois bien que j’ai mon nouveau livreur préféré. Enfin… Nouvelle ! » tu lui adressais un clin d’oeil bienveillant et relevais tout à coup la tête, en direction de la voix que tu venais d’entendre. Cette voix, tu ne la connaissais que trop bien : c’était celle de Ben, et tu ne l’avais jamais entendu ainsi : il avait l’air sacrément furax. Contre qui ? Lucy ? Non, impossible elle avait l’air si sympa...Ttends quoi ? Pas livreuse ? Tu restais bouche bée, avant de balbutier, un peu en panique : « hey, hey ! Ben, mon p’tit chou ! Euh… pas de panique ! C’est… euh… ma copine. Lucy. On était en plein jeu de rôle, j’te passe les détails, bref… Lucy, rentre s’il te plait ! » tu fis signe à la jeune femme d’entrer. Tu ne savais pas ce qu’elle te voulait, mais tu ne voulais pas qu’elle puisse avoir des ennuis : chaque chose en son temps. D’abord, tu gérais Ben. « ok, combien j’te dois, mon Benny ? » avais tu lancé, d’un ton affectueux, sortant ton portefeuilles de ta poche arrière, dégainant quelques billets verts « euh… ben comme d’hab Marty. Ecoutes j’veux pas savoir c’que tu fais avec ta meuf, ça vous regarde, mais… Faut qu’elle rende l’uniforme. Le patron est furax... » tu lançais un regard surpris et incendiaire à la blondinette, avant de reprendre « promis. On vous le rend. Tiens. Un pourboire, pour me faire pardonner. Bonne soirée, Ben ! À la semaine prochaine ! » tu lui adressais un clin d’oeil et refermais derrière toi, moitié furieux, moitié agacé : « ok. Alors là, j’attends de sérieuses explications. Vous êtes qui ? Vous foutez quoi chez moi, qu’est ce que vous me voulez ??? Et surtout : pourquoi est-ce que je connais votre voix ? » en fait, c’était même plus fort que ça : t’avais l’impression de l’avoir entendue tous les jours. Comme si elle faisait partie de ta vie. Et tu ne pensais pas si bien dire.